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Ecrire en attendant
14 novembre 2007

Culpabilité

Une des mes collègues de travail a perdu son bébé à cinq mois de grossesse. Elle est revenue travailler fin septembre alors que mon ventre s’arrondissait déjà nettement. Elle ne travaille pas dans mon service et même quasiment jamais en relation directe avec moi. Par contre, elle faisait partie du petit groupe avec lequel on mange le midi.

Depuis son retour, elle ne mange plus avec nous, ou avec l’une d’entre nous seulement et à des horaires décalés. J’étais plutôt soulagée de ça, car j’étais très mal à l’aise. J’avais tendance à rentrer le ventre ou à fermer ma blouse devant elle ou à son approche...

Mais alors que quelques mois avant elle me faisait la bise, le premier jour où l’on s’est recroisées elle m’a serré la main du bout des doigts sans me regarder. J’étais vraiment choquée. Pas par sa souffrance ni ce que je lui imposais bien malgré moi, mais « sous le choc », plutôt envahie à mon tour par sa douleur et la culpabilité. C’était un moment vraiment difficile. La culpabilité, c’était à la fois, être enceinte et à la fois être là devant elle, lui imposer ma présence et renforcer sa souffrance.

Je l’ai évité pendant quelques temps. Mon ventre s’est arrondit et je ne le cache pas bien au contraire. Mais en la croisant, j’avais tendance à me reprocher de n’avoir pas pensé à elle en m’habillant le matin. Ça ne durait pas, mais la culpabilité était là quand même.

Il y a quelques jours alors qu’on se disait bonjour, j’ai suivi mes collègues et l’ai « forcé » à lui faire la bise comme avant. J’ai tout de suite compris que ce n’était pas le bon chemin et surtout que ce n’était pas à moi de le faire. J’avais fait fausse route, je n’avais pas avancé du tout et je m’en voulais encore.

Et puis, j’en ai discuté avec une collègue infirmière qui m’a aidé à réfléchir à la situation avec plus de recul. Je me suis rendue compte qu’elle ne disait bonjour à personne, que tout contact la brusquait et avec qui que ce soit. Que sa souffrance était telle encore qu’elle s’était construit un mur de protection vis-à-vis des autres, qu’elle n’avait envie que personne franchisse et surtout pas pour lui parler.

J’étais assez surprise des conseils de mon infirmière : me protéger moi. Moi, pourquoi moi ? C’est elle qui souffre, non ? Mais finalement je n’avais pas réalisé ma culpabilité, ni même ma volonté inconsciente d’aller vers elle, pour lui demander « pardon ». Elle, n’est pas prête à entrer en contact et d’ailleurs elle n’a pas à le faire. M’éloigner donc. M’éloigner, c’est pour elle, ne pas forcer un contact inutile et c’est pour moi, accepter de lui laisser sa souffrance et arrêter de croire que j’y ai une place.

C’est très difficile à exprimer. Je suis sûrement assez maladroite. Si vous êtes choqués, n’hésitez pas à réagir.

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Commentaires
H
je suis infirmière également et enceinte de mon premier petit bout. je connais aujourd'hui la même situation, et c'est horrible. de plus, la profession fait que nous nous retrouvons fréquemment confrontée a de telle situation... les grossesses sans problèmes ne donnent pas lieu a des hospit après tout... et sa me fait horriblement peur, peur de vivre une telle situation. je sais, il n'y a pas de raison particulière, mais sa me retour l'estomac au moins une fois par jour... je ne sais pas comment faire pour lutter contre cette angoisse.
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