Elouan
Samedi 29/03 : Il fait
très beau, on passe la journée à Clermont. On
mange au resto le midi mais rien ne me fait envie, c'est étrange.
Je sens que quelque chose est en train de changer. Et je ne suis pas
la seule... Malo est accroché à moi toute la journée.
La ballade sous le soleil au jardin Lecoq est pénible, il veut
que je le porte tout le temps et râle dès que je fais un
pas de côté. J'ai des contractions et je commence à
me faire à l'idée que la naissance se rapproche.
Le soir de retour à
la maison, je suis claquée, Malo pleure, on fini par
s'endormir tous les deux.
Vers 20h, j'appelle
Arielle pour la tenir au courant d'une journée avec plus de
contractions que d'habitude.
Dimanche 30/03 : C'est une journée repos. J'en profite pour me remettre de la veille et profiter de Malo : on fait une grosse sieste tous les deux de presque trois heures. Le soir, je me couche paisiblement en me disant que la veille ce n'était qu'une fausse alerte liée à la fatigue d'une grosse balade et que j'emmènerais maman et Malo grimper la tour de l'horloge la semaine suivante.
Lundi 31/03 : Je suis
réveillée un peu après minuit par une
contraction diffénte des précédentes... Je me
réveille avec un sourire... c'est presque agréable de
retrouver cette sensation qui me rapproche de la naissance de Malo et
que j'avais une fois de plus peur de ne pas reconnaître.
Maintenant, je surveille
l'heure du radio-réveil : 7-8 minutes entre chaque
contraction. Je me dis que je réveillerai Stéphane dès
qu'on sera à 5 minutes. Je me lève vers 1h du matin
pour appeler Arielle.
On discute un peu et on
se met d'accord pour partir assez tôt pour faire la route
jusqu'à Thiers dans de
bonnes conditions. D'autant plus que depuis une semaine et la
naissance de la petite Charlie, j'appréhende d'avoir un
accouchement aussi rapide que Carène et de ne pas avoir le
temps d'arriver à la maternité... si j'avais su !!!
Je
prépare tranquillement mes affaires car le sac n'était
pas tout à fait prêt et je vais réveiller maman
Elle est déjà debout, au garde-à-vous ! Je sens
bien qu'il est sûrement trop tôt, mais je ne sais pas
trop quoi faire pour m'occuper et rester plus longtemps à la
maison au milieu de la nuit...
La
route se passe bien. Les contractions sont toutes les cinq minutes,
dans la voiture elles sont franchement moins supportables que debout
mais on chante Naheulbeuk à tue-tête, ça passe
plus vite !
On
arrive un peu avant 3h à la maternité, Arielle nous y
attend et... ce n'est pas grand chose, mais c'est agréable de
se sentir attendu ! On s'installe dans la petite pièce dont
j'ai oublié le nom pour les « formalités
d'accueil » : un monitoring (une fois installé, je
me mets sur le ballon du multi-trac), vérification des
dernières prises de sang et papiers pour l'admission. Après
un examen rapide, la dilatation du col est à peine à 4.
On
se met un peu de musique et j'alterne les positions debout contre le
mur et assise sur le ballon en accompagnant chaque contraction avec
les « yom », décidément
indispensables. Le temps passe doucement jusqu'à ce que les
contractions se fassent sentir dans le bas du dos. Arielle me masse
un peu et on essaie ensuite la réflexologie, c'est assez
efficace.
Vers
6h, je vais prendre un bain bien chaud avec des huiles essentielles
de thym et de mandarine. C'est très agréable, mais les
contractions s'espacent progressivement et je ne les sens quasiment
plus... En sortant, nouvel examen du col : on est à 6 grand
max... bref, ça n'a pas beaucoup bougé...
C'est
l'heure du petit déjeuner. On est vraiment bichonné :
petit déj servi dans la chambre pour nous deux, c'est classe
et ça fait du bien car la nuit a été courte !
Sur
les conseils d'Arielle, on va profiter du soleil pour faire une
petite balade dehors marcher, monter et descendre les escaliers. Les
contractions reviennent, mais elles ne sont plus très
régulières comme cette nuit. Il est presque 9h, on
s'installe en salle de naissance pour laisser la place pour les
consultations. Arielle a tout préparé pendant notre
promenade : le multitrac, les tapis par terre... on y amène
nos CD et nos provisions. On «yom » à chaque
contraction, c'est indispensable pour moi et ça m'aide aussi à
visualiser le bébé. Arielle me demande de l'aider à
descendre, à trouver son chemin vers la sortie. Elle me dit
aussi, en plaisantant, qu'on ne va pas y passer toute notre journée,
qu'elle doit être à la sortie de l'école pour
récupérer sa fille à 16h ! 16h... bien sûr,
ça me semble tellement loin encore !!!
Mais
le temps ralenti, les contractions sont irrégulières...
Les monitoring montrent que tout va bien pour le bébé,
mais je commence à fatiguer. J'ai adopté le multitrac :
suspendue les contractions se passent mieux et j'ai l'impression
d'aider mon bébé à descendre, l'impression...
Le
temps passe... Stéphane va déjeuner, moi je n'ai pas
vraiment faim, je grignote à côté de lui juste
pour reprendre des forces.
L'après-midi
passe, on essaie différentes positions sur le multitrac, sur
le lit, sur les tapis. C'est sur le multitrac que je suis le mieux,
suspendue. Mais allongée sur le côté, ça
me permet de me reposer un peu. La présence d'Arielle est
vraiment géniale : elle dose très bien ses venues, ses
départs, ses interventions... On se sent juste nous deux, mais
on ne se sent jamais seuls.
15h30...
je n'en peux plus... je suis fatiguée et j'en ai marre... je
sens toujours ses pieds au même endroit que la veille... ces
petits coups si agréables tous les jours précédents
m'agacent de plus en plus, comme à chaque fois un signe
supplémentaire qu'il n'a presque pas bougé encore... je
suis fatiguée, j'ai besoin de m'allonger, mais la position est
insupportable et je n'arrive plus à me décoller les
yeux de la pendule en me disant qu'Arielle ne sera jamais à
l'heure à l'école. Et ça suffit à me
faire éclater en sanglots. Je demande à Stéphane
d'appeler Arielle parce que je n'en peux plus, parce que je veux que
ça s'arrête, qu'on m'ouvre le ventre, qu'on attrape ce
bébé, qu'on le sorte de moi et qu'on en finisse.
Arielle
nous dira après qu'elle était soulagée que je
craque enfin, que c'était sûrement nécessaire
pour que notre bébé arrive parmi nous...
Elle
m'examine et comme le changement n'est pas flagrant, elle nous
propose de rompre la poche des eaux afin d'accéler le travail.
Ça se passe très vite, sans douleur supplémentaire.
Elle installe les derniers préparatifs pour la naissance dans
la salle et nous présente l'auxilliaire de puériculture
qui l'aidera au moment de la naissance. Tout ça me redonne un
peu confiance et surtout de l'énergie pour pousser mon bébé
vers la sortie. Encore quelques contractions sur le lit et on
s'installe sur le multitrac pour la dernière partie, toujours
suspendue avec le tabouret d'accouchement entre deux contractions.
16h30,
les sensations sont différentes, je commence à sentir
mon bébé s'engager et à le sentir descendre sur
certaines contractions. L'énergie revient (d'où ?).
J'entend leurs voix de loin, mais je suis surtout de plus en plus
avec mon bébé. Je l'engueule, je lui demande clairement
de venir maintenant. Vingt minutes plus tard, j'aperçois ses
cheveux dans le miroir à côté d'Arielle. Elle me
force presque à regarder, alors que je suis bien dans la
position inverse la tête en arrière contre le torse de
Stéphane. Mais comme elle a raison ! dès que je le
vois, c'est différent, tout va très vite, le miroir
m'aide beaucoup. Surtout quand Arielle m'incite à ne plus
pousser, à retenir le mouvement. Moi qui n'ai pas fait très
régulièrement les exercices de préparation du
périnée, ça me semble très facile, je
ressens très bien les choses et j'ai l'impression de maîtriser
enfin quelque chose.
Quelques
instants plus tard, Élouan est posé sur mon ventre.
Le
temps s'arrête.
Arielle
attend que le cordon cesse de battre pour le couper. Le placenta sort
très vite (une petite injection de sécurité a
été nécessaire, Arielle nous avait prévenu,
vu la durée du travail et la rareté des contractions
afin de ne pas prendre de risque pour la délivrance).
Ils
m'installent tous les trois sur le lit avec Élouan qui pleure
très très fort. Je le laisse trouver le chemin des
seins, mais ses pleurs embêtent beaucoup son papa qui m'incite
à le rapprocher au plus vite.
Première
tété, premiers texto envoyés, premières
photos... on est tous les trois, qu'on est bien !
Arielle
s'occupe de ranger la pièce, de faire les papiers... et au
bout d'une heure ou peut-être deux, elle vient peser Élouan
(4,110 kg) et nous parler un peu, nous raconter aussi qu'il a eu du
mal à trouver le chemin et le bon sens pour le prendre, qu'à
un moment de la journée il avait la tête très mal
placée et qu'il a fini par trouver le bon axe. Ce bébé
d'avril est finalement arrivé le 31 mars ! Elle nous montre le
placenta et nous explique en détail son fonctionnement, c'est
génial ! Et puis, un brin de toilette (pour le bain, on verra
demain) et Arielle joue un peu à la poupée pour lui
mettre ses vétements. Elle le mesure pour compléter les
papiers, donc sans tirer sur sa jambe : on est d'accord pour écrire
50cm sur le carnet de santé (8 jours plus tard, le médecin
le mesurera à 56cm !).
On traverse le couloir pour rejoindre ma chambre, il est déjà plus de 19h. Le dîner est chaud et m'attend. Stéphane ne tarde pas à partir car la journée a été longue et il a encore de la route avant de rejoindre la maison. Quelle journée !
On passe la nuit tous les deux l'un contre l'autre dans le lit, calé par le coussin d'allaitement et on s'endort paisiblement jusqu'au matin, il tète déjà comme un chef !
- - -
La
naissance d'Élouan a été longue mais...
tellement simple en même temps ! La présence d'Arielle a
été formidable, notre projet de naissance a été
respecté dans son intégralité et nous trois
aussi par la même occasion ! Nous sommes restés acteurs
de cette naissance à tout moment, Arielle nous poussant à
prendre les décisions quand on ne savait plus trop quoi faire
sans jamais nous laisser seuls.
Grâce
à cet accompagnement, Élouan est né à son
rythme, sans geste inutile ou inexpliqué. Je suis rentré
à la maison 36h après sa naissance, en pleine forme,
avec la sensation de n'avoir qu'une nuit blanche à récupérer
et plein d'énergie pour continuer notre chemin !
J'ai écrit ce récit un peu trop tardivement peut-être, Élouan a déjà presque un mois et beaucoup de détails ont dû s'envoler... d'autres être digérés... mais je ne souhaite qu'une chose, c'est que notre prochain accouchement se passe de la même façon (mais peut-être un peu plus vite !).
Note du papa
Je
viens de relire et même s'il faudrait du temps pour ajouter
d'autres commentaires et écrire en doublon ce récit ;
je ne vois rien à développer. En ce qui me concerne, le
chant et la présence mesurée d'Arielle m'ont donné
la sensation d'être plus utile lors de cet accouchement que
pour celui de Malo. Je n'ai pas du tout eu la sensation d'être
toléré dans un secteur médical mais bel et bien
traité et encouragé à être un participant
; essayant d'apporter des vibrations avec les yom pour aider. Je me
suis senti en tout cas très impuissant quand Steph a craqué
et j'étais content de trouver de l'énergie et du
soutien, en passant la main à Arielle pour la fin. C'est
peut-être la partie où je me suis le moins senti utile,
mais à posteriori, celle où Steph m'a dit que mes
paroles (je faisais des yom en sourdine, comme un mantra pour aider)
qu'elle ne comprenait/n'entendait pas ont été très
positifs, encourageants.
En
tout cas, Arielle, un grand merci ! Tu nous as accompagné avec
la même sérénité et la même énergie,
alors que ta nuit était sans doute encore plus courte que la
notre.